Maître
Un voyage de mille li débute par le premier pas...
J’ai commencé le judo à trois ans et un homme qui enseigne cet art est âgé et souffre tous les jours à cause de l’arthrose qu’il a contractée en pratiquant ce sport. Et, pourtant, il continue à apprendre à ses élèves le judo. Cet homme a un caractère bien à lui qui est parfois difficile à comprendre. Mon maître ne laisse jamais apparaître ses émotions.
Cet homme est un ancien champion, alors il pousse tous ses élèves aux extrêmes limites de leur force, de leur souplesse, de leur technique et de leur intelligence.
Un jour, je me blessai pendant son cours. Il s’approcha de moi, m’empêcha de pleurer, me porta jusqu’aux vestiaires situés à l’autre bout du tatami et me demanda :
«Où as-tu mal Jean ?» j’étais tout étonné qu’il connaisse mon prénom car j’étais encore nouveau et discret. Je répondis (sans pleurer donc…) que c’étais l’épaule. Il tira délicatement mon kimono pour voir mon articulation et me dit :
«Oui, je comprends, elle est déplacée. Bon…Je vais te la remettre en état. Ça fera très mal. Mais, si tu me regardes dans les yeux, que tu mords le col de ton kimono et que tu penses à autre chose, tu ne pleureras pas.»
Effectivement, vu sous cet angle cela paraît impossible pour un enfant de trois ans de coordonner autant de mouvements et de pensées. Je ne sais pas par quel miracle je réussis. Soudain, j’entendis un Crac! phénoménal. Je souffrais le martyr mais je ne pleurai pas. Mon maître ne m’avait pas quitté des yeux. J’avais pourtant remarqué qu’il avait mal et ce sentiment me fit verser une larme en silence. Je pus remonter sur le tatami au cours suivant après m’être fait ausculter par un médecin. Lors de la consultation, le docteur dit à ma mère:
«Vous avez de la chance qu’aucun des ligaments de votre fils ne soit touché, aurait pu avoir des séquelles toute sa vie. Mais selon mes tests, il est hyperlaxe.»
Je ne comprenais pas ce que cela voulait dire et lorsque je demandai à ma mère, je compris encore moins.
Le cours suivant, je remerciai mon maître et il me dit:
«Plus tard tu seras un bon !». Encore une expression que je ne comprenais pas ! Décidemment !
Maintenant que je me remémore ces souvenirs, je comprends tous ces termes, hyperlaxe signifie que j’ai les ligaments des articulations extrêmement souples ce qui est un avantage dans un sport comme le judo. Et, maintenant je continue à apprendre le judo pour repousser mes limites grâce a mon Maître ce héros !
Jean