Roger ARBUS dernière leçon
Le judo est un chef d’œuvre d’intelligence vive écrivait Maitre Arbus. Pour illustrer son propos et nous égarer ou nous faire perdre notre équilibre de bon occidental formaté, il ajoutait à son enseignement cette phrase de Bergson :
« Il y a des choses que l’Intelligence seule est capable de chercher, mais que par elle-même elle ne trouve jamais. Ces choses, l’instinct seul les trouverait, mais il ne les cherche jamais. »
Il poursuivait : l’habileté, l’adresse, la justesse du moindre de nos mouvements ne viennent pas de la pensée, ni même le plus souvent d’un apprentissage mécanique. Savoir sentir le moment dans le déplacement et accepter la chute sont les clés du judo.
Il ajoutait en reprenant les propos d’un de ses élèves : L’homme qui chute ne tombe pas. Il ne cesse de se tenir droit, dans toutes les directions, jusqu’à retrouver sa position initiale.
Cette liberté dans le judo ne s’acquiert qu’au terme d’une longue répétition, à travers un long apprentissage. L’esprit grandit progressivement. De ce développement émerge une configuration, un moyen d’expression. Il faut regarder, assimiler, et trouver sa propre expression du moment et le sens exact.
Le judo ne vise pas à la destruction mais à l’édification. Je m’applique à ce que l’élève comprenne non la brutalité, mais l’élégance qui réside au cœur de la technique. Dans l’enseignement que je préconise, il s’agit de faire corps avec les différents élèves qui se trouvent au dojo. Il faut être attentif à l’osmose entre tous. Chacun différencie son approche pour le même mouvement.
C’est là ma façon de penser.
Dans un de ses derniers courriers adressés il y a quelques mois de cela à d’autres judokas haut-gradés il avait écrit sans désespoir quant à l’avenir :
« ll m’a été très agréable d’être parmi vous. Je vous suis très reconnaissant de ce moment très enrichissant. »